HERVÉ DELAMARE         Sculpture, arts visuels


Éloge de l’ombre

peinture, peinture-objet / painting, painting-object





L’usine des Extraits, 1989 - Tréteau à construire Hybride, 1990 - Bruine et déliquescence, 1990 - Saturnisme, paysage de plomb, 1990.

The Extracts factory, 1989 - Hybrid trestle to be built, 1990 - Drizzle and decay, 1990 - Lead poisoning, leaden landscape, 1990.





De 1988 à 1996 Hervé questionne essentiellement le paysage urbain périphérique, industriel et ses objets abandonnés, usagés. La friche industrielle occupe de ce fait

une place centrale, conscéquence de l’économie dérégulée des années quatre vingt, les « années Thatcher et Reagan ».  Au travers de ces paysages de désolation,

le jeune artiste interroge le passage du temps, les traces de notre propre civilisation, la mémoire ouvrière. Ses oeuvres renvoient également à l’esthétique classique de la

nature morte dite de vanité, aux questionnements philosophiques liés à l’impermanence de toutes choses. Comme dans deux diptyques : Bruine et déliquescence 1990

et Friche capital 1995. L’une des principale référence de l’artiste est la célèbre gravure d’Abrecht Dürer : Mélencholia.Nombre d’oeuvres s’y rattachent, que ce soit dans

leurs compositions ou dans leurs titres, comme pour Paysages saturniens 1992. Une influence littéraire joue également un rôle important, comme l’essai L’éloge de l’ombre 

du romancier Jun’ichiro Tanizaki. Hervé mettra en scène des extraits du texte dans une exposition itinérante qui en reprend le titr (1994 - 1995 médiathèques du Havre,

de Nanterre et de Dieppe). Si dans ces paysages dégradés et ces ruines industrielles la figure humaine est absente,  ce sont les objets, les architectures, qui en distillent

les affres et la condition. Comme dans : Extrême pression 1992, Territoire sous pression 1992, ou bien encore : Endosser 1994.


From 1988 to 1996 Hervé essentially questions the peripheral, industrial urban landscape and its abandoned, used objects. The industrial wasteland thus occupies

a central place, a consequence of the deregulated economy of the eighties, the “Thatcher and Reagan years”. Through these landscapes of desolation,

the young artist questions the passage of time, the traces of our own civilization, the working memory. His works also refer to the classical aesthetics of

so-called still life of vanity, with philosophical questions linked to the impermanence of all things. As in two diptychs: Drizzle and deliquescence 1990

and Friche capital 1995. One of the artist's main references is the famous engraving by Abrecht Dürer: Melencholia.

their compositions or in their titles, as for Saturnian Landscapes 1992. A literary influence also plays an important role, such as the essay Praise of the Shadow

by novelist Jun'ichiro Tanizaki. Hervé will stage excerpts from the text in a traveling exhibition which takes up the title (1994 - 1995 media libraries in Le Havre,

Nanterre and Dieppe). If in these degraded landscapes and these industrial ruins the human figure is absent, it is the objects, the architectures, which distill

the pangs and the condition. As in: Extreme pressure 1992, Territory under pressure 1992, or even: Endorse 1994.






Paysage étendu, 1992 - Extrême pression, 1992 - Endosser, paysage ferroviaire, 1992 - Paysages saturniens, 1992

Extended landscape, 1992 - Extreme pressure, 1992 - Endorse, railway landscape, 1992 - Saturnian landscapes, 1992 







Empilement tables rases, 1989 - Entre deux, paysage portuaire, 1994 - Paysage tub, 1994 - Débarras obscur, 1994 - Tempête sous un crâne, 1990

Stacking clean slates, 1989 - Between two, port landscape, 1994 - Tub landscape, 1994 - Obscure storage room, 1994 - Storm under a skull, 1990





En 1995, deux peintures vont clôturer ce premier cycle de création : Le terrain vague et Le semeur de tolérance. 

Deux tables rases qui appellent sans doute d’autres horizons, ils vont être « végétanimal ».

In 1995, two paintings will close this first cycle of creation: The vacant lot and The sower of tolerance.

Two clean slates that undoubtedly call for other horizons, they are going to be “vegetableanimal”.













            CI-DESSOUS LES ARCHIVES DÉTAILLÉES DU CYCLE SOUS LA FORME DE GALERIES D'IMAGES.

Pour les ouvrir, cliquez sur les titres ci-dessous.


BELOW THE DETAILED ARCHIVES OF THE CYCLE IN THE FORM OF IMAGE GALLERIES (not translated)

To open them, click on the titles below.





Jardins ouvriers



L’usine des Extraits



Tabula Rasa


Mémoire disparition


Célébration de l’Eure





Éloge de l’ombre



Dans la ville & sur les tables


Usine Dresser-Rand


Processus programma



Nature morte de vanité.

Le semeur de tolérance.










NOUS SOMMES DEVENU DES LOTOPHAGES AU CENTRE D'UN PAYSAGE AMNÉSIQUE.

Hervé Delamare 1990 


La plupart des paysages que le temps macule sont rangés loin des regards, ou détruits.

Leur préservation, leur identification serait valeur à réfléchir notre propension à édifier, construire, fabriquer. Cette vision mnésique deviendrait alors analyse tangible à dévoiler davantage sous une lumière limpide, les systèmes monstrueux, sinon obscènes, de surproduction de besoins, formidablement soutenu par les médias. Système de paysage, de culture, d’individu, une fois périmé, jetable. Bien au contraire d’une préservation, les friches une fois rasées laissent place aux parkings, H.L.M., drugstores et autres centres commerciaux, reflets de nos sociétés de l’abondance. Un regard éveillé qui se fixerait sur un produit, un lieu usagé, désacraliserait ces objets et paysages renouvelés à grande vitesse. Aujourd’hui, on édifie un îlot de H.L.M. plus rapidement que la table rase du site où il sera construit. Il est devenu impossible avec recul et lucidité de réaliser les transformations incessantes de nos paysages urbains, donc d’en mesurer les vraies conséquences. Paysages se maquillant ; transformations mécanisées comme les décors de gigantesques théâtres, rythmés successivement par des « représentations » faites pour séduire, s’enchaînant sans respiration. Ce mouvement uniformise les villes, les métamorphosent  en « ville-clone », sans identité. La même architecture pour les mêmes besoins et les mêmes humains … Une école d’art finit par ressembler à une banque, ou l’opposé, on ne sait plus très bien. Mouvement économique réussissant presque à gommer, puis à régénérer le « rêve d’un progrès social ». Ainsi, donner un intérêt objectif et passionné au paysage usé et usagé, va à l’encontre des hymnes à l’abondance prônés par nos sociétés civilisées. Face aux idéaux du sur-neuf, l’intérêt exhumant les friches de l’oubli devient un acte pernicieux. Il est immédiatement sans réflexion jugé comme synonyme de noirceur, désolation, tristesse, passéisme, nostalgie. En vérité cet acte d’observation, soulève : interrogations et affirmations, déséquilibrant la pertinence d’une technostructure de la surproduction irrémédiablement propre et sans reproche. De grand accroissement pour nos gros besoins, de grandes évolutions pour de gros apparats. Entre ville et théâtralité, urbanisme des banlieues et zones industrialisées, les paysages d’aujourd’hui sont devenus avec leurs âmes mnésiques et leurs amnésies, de grands corps éparpillés. Ce grand théâtre de nos mentalités sédentaires, fonctionne comme un leurre. Un kaléidoscope de notre bonne conscience. Une conscience convaincue des actions bienfaisantes de tous ces changements. En fait rien ne s’est déplacé. Les idéaux restent emprisonnée dans la profusion des objets de nos désirs. Ce n’est pas un hasard si le grand mur brisé, le voile ouvert, s’est développé une pseudo-crise de conscience des problèmes essentiels. Mais l’on reste dans des « solutions-pansements », protégeant un capitalisme forcené et hiérarchisé. L’œil de la conscience s’est entrouvert. Le dialogue nord-sud est terriblement insuffisant ; drames démographiques et écologiques demeurent intimement liés.Le nord édifie un mur mental, bétonne un axe est-ouest, poursuivant son sur-développement sans travailler pour une réalité pleinement planétaire. La méfiance des deux pôles s’enracine, les murailles prennent fondations. Nous ne faisons que nous tirer l’échelle de la conscience dont nous ne gravissons pas les échelons. Tout semble bouger dans un monde profondément immobile et fragile. Nous vivons dans une immense « vanitas » aux fruits savoureux d’une grande beauté, qu’il nous faut « cyclo-consommer ». Fruits «  pimentés d’invisibles fleurs de lotos. Nous sommes devenu des Lotophages au centre d'un paysage amnésique.




WE HAVE BECOME LOTOPHAGES AT THE CENTER OF AN AMNESIC LANDSCAPE.

Herve Delamare 1990


Most of the landscapes that time smears are put away from view, or destroyed.

Their preservation, their identification would be valuable to reflect on our propensity to build, build, manufacture. This mnesic vision would then become a tangible analysis to reveal more in a limpid light, the monstrous, if not obscene, systems of overproduction of needs, tremendously supported by the media. System of landscape, culture, individual, once outdated, disposable. Quite the opposite of preservation, once razed wasteland gives way to car parks, H.L.M., drugstores and other shopping centers, reflections of our societies of abundance. An awakened gaze that would fix itself on a product, a used place, would desacralize these objects and landscapes renewed at high speed. Today, we are building an island of H.L.M. faster than the clean slate of the site where it will be built. It has become impossible with hindsight and lucidity to carry out the incessant transformations of our urban landscapes, and therefore to measure the real consequences. Landscapes making up; mechanized transformations like the sets of gigantic theatres, punctuated successively by "representations" made to seduce, one after another without breathing. This movement standardizes cities, transforming them into "clone cities", without identity. The same architecture for the same needs and the same humans… An art school ends up looking like a bank, or the opposite, we don’t really know. Economic movement almost succeeding in erasing, then regenerating the "dream of social progress". Thus, giving an objective and passionate interest to the worn and used landscape, goes against the hymns to abundance advocated by our civilized societies. Faced with the ideals of the over-nine, the interest that unearths the wastelands of oblivion becomes a pernicious act. It is immediately judged without reflection as synonymous with darkness, desolation, sadness, backwardness, nostalgia. In truth this act of observation, raises: interrogations and affirmations, unbalancing the relevance of an irremediably clean and blameless technostructure of overproduction. Big growth for our big needs, big evolutions for big trappings. Between city and theatricality, urbanism of the suburbs and industrialized zones, the landscapes of today have become with their memory souls and their amnesias, large scattered bodies. This great theater of our sedentary mentalities works like a decoy. A kaleidoscope of our good conscience. A convinced awareness of the beneficial actions of all these changes. In fact, nothing has changed. Ideals remain imprisoned in the profusion of objects of our desires. It is no coincidence that the great broken wall, the open veil, has developed a pseudo-crisis of consciousness of essential problems. But we remain in "band-aid solutions", protecting a frenzied and hierarchical capitalism. The eye of consciousness is half-opened. North-South dialogue is woefully insufficient; demographic and ecological dramas remain intimately linked. The north is building a mental wall, cementing an east-west axis, continuing its over-development without working for a fully planetary reality. The distrust of the two poles takes root, the walls take foundations. We only pull ourselves up the ladder of consciousness whose rungs we do not climb. Everything seems to move in a profoundly still and fragile world. We live in a huge "vanitas" with tasty fruits of great beauty, which we must "cyclo-consume". Fruits "spicy with invisible lotus flowers. We have become Lotophages in the center of an amnesic landscape.